Le mois dernier, sous la conduite de mon petit cousin Nicolo, nous avons abandonné pendant quelques heures la «Sérénissime» pour se promener en montagne, dans les Dolomites, massif des Préalpes orientales méridionales, inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO, à seulement une centaine de kilomètres de Venise….
Juste un saut de puce pour tous vénitiens désirant skier ou se promener en montagne…..

Nicolo souhaitait nous faire découvrir un de ses petits restos favoris de montagne, «l’INSONNIA» à «FORNO DI ZOLDO» dans la province de BELLUNO….
Deux à trois chalets, perdus dans la nature….

Et le restaurant typique….

La fumée sort de la cheminée, Il fait froid, il fait faim, vite, nous nous dirigeons vers la porte hospitalière….

À l’intérieur, ambiance agréablement montagnarde d’un chalet fait de vieilles pierres et de bois….

Dans la petite salle de gauche, un grand feu à l’âtre occupe le centre de la pièce….

Et quelques clients, bien au chaud, déjeunent sur les bancs tout autour…..

Décidément, on se sent bien ici….

Sitôt assis, arrive la fiasque remplie d’un petit vin rouge gouleyant de Vénétie qui, transvasé sitôt dans nos verres, vient désaltérer nos gosiers assoiffées….

Le repas suit illico presto….
Les plats se succèdent les uns derrière les autres, bientôt attaqués par nos appétits féroces….
Le froid provoquant chez nous une faim de loup, même pas pensé à photographier les mets avant de les avaler tout chauds…. Vous ne verrez donc que ce qui reste dans les écuelles après nos premiers assauts….
Ici, pas de cartes, pas de menus, on ne commande pas, on ne choisit pas, on mange ce que l’on vous sert, et basta!….
La Polenta noire que l’on trouve dans ces montagnes….

Un succulent plat de viandes en sauce, bœuf et veau….

Les bons haricots rouges à la vinaigrette….

Les pommes de terre sautées….

Le fameux «Museto» cette grosse saucisse bien grasse que l’on trouve partout en Vénétie….

Il y avait aussi tout un plat de «Polpette» ces boulettes grillées faites avec un mélange de viandes et saucisses de la région, cuite avec des épices, trop bonnes…. Pas de «foto», entièrement avalées…..
Le fantastique fromage grillé de montagne!….

Après le fromage, nous nous sommes installés près de l’âtre pour prendre le désert….

Une énorme part de tarte, bien crémeuse et consistante à souhait….

La Flo, toujours au téléphone même pendant le désert, le job, c’est le job!….

Le café accompagné des «Grappa», l’alcool national de l’italie….

4 grappas différentes, 4 différents parfums…. Je les ai toutes goutées…. Même à plusieurs reprises pour bien sentir les dîtes différences….
Il y en avait des bien costaudes, n’est-ce pas Hugo?….

Pour ce joyeux repas montagnard, avec vin à volonté, café et grappa compris, seulement 20€ par personne!…. Ca vaut le détour….
Une fois le repas achevé nous sommes allés à 30 km, faire un pèlerinage au barrage du «Vajont» dans la province de «Pordenone»….
Nous voici sur les lieux, au pied du Mont Toc, surplombant ce qui fut autrefois le lac artificiel de retenue des eaux….

Ne fait pas chaud, même si nous sommes bien couverts :
la Flo….

L’Hugo….

L’Evelyne et son sac….

Mais «Que la montagne est belle» quand la cime enneigée se perd dans le blanc du ciel glacial…

Tous les italiens ont encore en mémoire le drame du barrage du Vajont…. Les français peut-être moins….
Le barrage de Vajont, construit de 1956 à 1959, est situé au-dessus de Longarone, au pied du Mont Toc. Il est désaffecté depuis la catastrophe qui l’atteignit le 9 octobre 1963……
Sur la photo, nous sommes du côté où était précédemment le lac de retenue des eaux….

Voici la triste histoire de la catastrophe du barrage du «Vajont» :
«La SADE (Società Adriatica Di Elettricità), société qui a construit le barrage, a affirmé que la géologie de la gorge avait été étudiée, y compris l’analyse d’éventuels glissements de terrain, on croyait ainsi que celui-ci serait suffisamment stable. Cependant, lors du remplissage du barrage on a pu constater une modification dans la roche ; un premier glissement de terrain a eu lieu le 4 novembre 1960. On a donc fait baisser le niveau du lac qui a alors été contrôlé attentivement. Les recherches ont conclu qu’une catastrophe était peu probable. Le lac fut entièrement rempli puis vidé à trois reprises.
À ce moment-là, l’Italie débutait une nationalisation des centrales électriques, et la SADE était impatiente de vendre ce barrage à un service public.
Le 9 octobre 1963 à 22 h 39, un glissement de terrain fait s’écrouler 260 millions de mètres-cubes de terres et de roches dans le lac de retenue du barrage, à plus de 110 km/h. Au passage, l’éboulement emporte les systèmes de lignes d’alimentation électrique, plongeant ainsi Longarone dans le noir sur un kilomètre et demi. Deux vagues de 25 millions de mètres-cubes d’eau chacune se propagent d’amont en aval du lac de retenue en débordant du barrage. La masse d’eau détruit les villages de Longarone, Pirago, Rivalta, Villanova et Faè, et touche d’autres nombreux petits villages aux alentours (Castellavazzo, Erto e Casso…). On estime à environ 1900 le nombre de personnes tuées par le méga tsunami. Le barrage, lui, n’a pratiquement pas été endommagé.

En jaune «frana» c’est l’éboulement, «diga» c’est le barrage….
Les signes avant-coureurs de ce glissement de terrain dûment mesurés chaque jour étaient suivis depuis des mois par les ingénieurs responsables qui croyaient maîtriser la situation en faisant varier le niveau du plan d’eau. Ils avaient même prévu que l’éboulement, suivi d’une vague de 20 m de haut (selon leurs calculs, sans ordinateurs à l’époque), se produirait dans la nuit du 9 au 10 octobre, vague qui devait, selon eux, être contenue par le barrage dont la partie émergente de béton dépassait de 25 m le plan d’eau. Les ingénieurs avaient même invité, cette nuit-là, l’équipe de maintenance du barrage à suivre l’éboulement et le tsunami prévus du haut du barrage. Or, la vague qui en découla était plus de 10 fois plus haute que prévue et balaya toutes les personnes présentes sur le barrage et les alentours, avant d’engloutir les villages en aval et leurs 1900 habitants. Quelques personnes positionnées sur les hauteurs du lac ont pu témoigner de l’énormité du double tsunami.

animation digitale de l’éboulement du Mont Toc
On a estimé par la suite qu’il avait été inconscient de ne pas faire évacuer les populations en aval du barrage pour le cas où les ingénieurs se seraient trompés dans leurs calculs.
L’un des responsables du désastre se suicidera. Pour la plupart, les autres responsables politiques et techniques ont été absous faute de preuves, en dehors de l’ingénieur en chef du projet, Alberico Biadene, condamné à 5 ans de prison en 1977(et ayant bénéficié d’une mesure de grâce au bout d’un an).
Depuis un demi-siècle, le site a fait l’objet de nombreuses investigations scientifiques qui ont notamment révélé, entre le sol instable qui s’était effondré et la roche dure sous-jacente, la présence d’une mince couche d’argile. Celle-ci avait été fragilisée par les variations de niveau du lac conduites par les ingénieurs. La nuit fatidique, après un lent processus de plusieurs semaines, cette couche d’argile, sous l’effet conjugué de la pression des terres et de l’eau qui l’imbibait, a fini par se fragmenter totalement, entraînant vers le lac les 40 m d’épaisseur de sol meuble qui s’appuyaient sur elle depuis des millénaires. Les sondages trop peu profonds des sols, effectués lors des études préliminaires du projet de barrage n’avaient pas révélé la présence de cette couche d’argile, sinon le projet aurait été annulé»
(sources Wikipédia)
Pour ceux qui parlent italien, voici la vidéo d’un spectacle de théâtre d’une heure vingt sur cette tragédie…. Ce spectacle a rencontré un énorme succès et fut interprété dans toute l’Italie….
Nous descendons au pied du barrage désaffecté….

Ce barrage gigantesque faisait 261 mètres de haut…. Il n’émerge plus qu’un tiers du barrage, soit environ 90 mètres… les deux autres tiers, soit 170 mètres, sont enfouis sous l’éboulement de la montagne….

Sinistre, quand on pense à la montagne tombée dans le lac de retenue et les 1900 victimes provoquées par la vague en amont et la vague en aval ….

Une fois remontés au niveau de la route d’accès, un calicot permanent de triste mémoire rappelle le drame….

Sur les traverses de sécurité en bois, devant le précipice, des fanions de couleur sont accrochés….
Sur chaque fanion, datés du 9 octobre 1963, le nom, le prénom et l’âge de chaque enfant tués dans la catastrophe….






C’est affreusement interminable….

Le mont Toc ce soir, illuminé comme un phare de la «mémoire» par le soleil du crépuscule, nous laissera d’amères pensées….