L’ÎLE « LAZZARETTO NUOVO », sur la LAGUNE NORD de VENISE
Posté par Claudio Boaretto le 27 novembre 2015
En ce mois de novembre 2015, après ces périodes de souffrance et de deuil suite aux attentats de Paris, la vie doit reprendre son cours….
Fidèle à mon habitude, écrivant des articles uniquement sur ce que je vois ou je fais, je vous emmène encore dans mes pérégrinations lagunaires…
Après le « Lazzaretto Vecchio » (Vieux Lazaret), nous voilà sur l’île du « Lazzaretto Novo » (nouveau Lazaret, novo en vénitien, nuovo en italien) …
Pour ceux qui prennent le train en marche, consultez déjà le billet illustré précédent sur :
L’ÎLE « LAZZARETTO VECCHIO », sur la LAGUNE SUD de VENISE
Du « Lazzaretto Vecchio » (flèche rouge) sur la lagune sud, au « Lazzaretto Nuovo » (flèche jaune) sur la lagune nord, à vol d’oiseau, presque 6 kilomètres séparent ces deux îles complémentaires…
Le « Lazzaretto Novo » compte une superficie de 3 hectares ; une vue du ciel par Google Earth nous permet de voir qu’il ne subsiste que peu de bâtiments, mis à part le grand « Tezon » (le grand bâtiment, indiqué par la flèche jaune), tous les autres ayant été détruits par l’envahisseur napoléonien qui transforma cette île en une immense poudrière militaire…
(la flèche rouge indique le débarcadère permettant de pénétrer dans l’île)
L’histoire en abrégé :
« Monastère bénédictin durant le Moyen Âge, l’île devient en 1468, par décret de la Sérénissime, un Lazaret, île où siège le « Devoir de prévention des contagions », institution vénitienne exportée par la suite partout à travers le monde.
L’île servit ainsi de dépôt de marchandises, apportées par les navires venant du Levant, suspectées d’être infectées par la peste afin de les examiner sur place. Avec l’épidémie de 1576, l’île reçu également des habitants à risques afin d’examiner leur état de contagion. Si la visite diagnostiquait la maladie, les malades étaient transférés d’urgence à l’hôpital de Lazzaretto Vecchio. »
Ce qu’il faut retenir en bref, c’est qu’au nouveau Lazaret les vénitiens mettaient en quarantaine les marchandises provenant des cargaisons des bateaux, tandis qu’au vieux Lazaret, la quarantaine étaient pour les individus suspectés de maladies infectieuses…
Tous les bateaux passaient alors par l’étape obligatoire du nouveau lazaret…
Un plan d’époque montre l’île quand ces fonctions battaient leur plein, où l’on voit bien tous les grands voiliers autour du lazaret…
Vous constaterez que le débarcadère (flèche rouge) est toujours au même endroit…
Traversant quelques étendues aqueuses pour atteindre l’île, (nous arrivons de Murano) nous profitons du spectacle de l’automne envahissant la lagune…
Je suis toujours séduit par ce paysage typique lagunaire, qu’il soit ensoleillé ou gris, le ciel et la lagune, coupés en leur milieu par de fins traits de terres insulaires…
Les « Barene », revêtant leur parure automnale, sont habitées par les oiseaux marins, en l’occurrence quelques blanches aigrettes…
Voici le séculaire débarcadère où nous arrêtera dans quelques instants la ligne 13 du vaporetto…
Ce n’est pas un arrêt habituel, il faut absolument faire la demande au marin du bord qui la transmet au pilote, sinon le bateau ne s’arrête pas à ce ponton…
Comme nous sommes en avance sur l’heure programmée de la visite guidée, nous décidons de faire le tour de l’île par le chemin de ronde à l’extérieur du mur d’enceinte, la végétation de l’île nous offrant un spectacle sauvage et mystérieux…
Tout autour, encore et toujours notre lagune avec ses « Barene », ses lais, ses marais salants…
Ici, nous accrochons le reflet d’un arbre dans les petits canaux irriguant les « Barene » …
Là, nous traversons un romantique « petit pont de bois » enjambant les dits-canaux,
Où les aigrettes chassent le poisson…
Nous abordons maintenant la rive nord-ouest de l’île, le chemin de ronde longe le mur d’enceinte au raz des « Barene » …
Repérez bien l’avancée des fortifications face à nous, ainsi que le petit pont que nous franchissons, je vous les montrerai tout à l’heure d’un autre angle…
Nous venons de dépasser l’avancée…
Quelle jolie promenade pédestre en milieu de la lagune…
Au loin, nous apercevons Venise…
Au centre de l’image, deux campaniles se détachent,
légèrement à gauche : le campanile de « San Francesco delle Vigne » dans le « Sestiere de Castello »,
légèrement à droite : le campanile de « San Marco »…
4 kilomètres en ligne droite nous séparent de ce dernier…
Nous voilà de retour à l’entrée du « Lazzaretto Nuovo » où une grande pancarte explicative annonce la destination actuelle de l’île…
Nous avons franchi l’enceinte fortifiée et le guide, membre du club d’archéologie de Venise, nous fournit quelques explications sur les lieux…
Le « Tezon » ; dans ce grand bâtiment, datant d’au moins 600 ans, se trouve maintenant, dans sa première partie à gauche, le « Museo di antropologia della laguna di Venezia », dans sa seconde partie à droite, non ouverte au public, sont remisés les dépôts archéologiques découverts dans la lagune…
En son milieu, l’entrée séparant le bâtiment en deux…
Mais ce n’est pas par-là que nous entrerons, Pfffff… trop facile…
À droite et à gauche subsistent encore les 2 « Caselli di Polvere » (poudrières)…
Ils étaient à l’époque entièrement bâti en pierre d’Istrie avec un toit de pierre en pointe afin d’étouffer toute explosion accidentelle…
Mais Napoléon est passé par là, il a piqué les pierres d’Istrie, sauf celles du bas, ainsi qu’abattu les nombreux bâtiments, pour réutiliser les matériaux afin consolider le mur d’enceinte…
Des fois à Venise, quand l’époque napoléonienne est évoquée, on se sent presque gêné d’être un peu français…
Sur la carte d’époque nous voyons bien les deux poudrières dans leur état original en pierre d’Istrie… Et, à part le grand « Tezon », Napoléon a rasé quasiment toutes les autres constructions que nous apercevons sur la carte…
Ce « Va-t’en-guerre » a également fait murer toutes les arcades du « Tezon » où l’on stockait les marchandises, épices et grains venus d’Orient, pour le transformer aussi en une énorme poudrière…
Nous pénétrons dans le « Tezon » par sa partie latérale côté est, partie devenue espace muséal…
Je suis toujours stupéfait par les longueurs extravagantes de ces bâtiments vénitiens… Le « Tezon » fait 100 mètres de long, c’est le plus grand après la « Teza Longa » de la corderie de l’arsenal de Venise dédié aux expositions de la Biennale…
Et nous n’en voyons que la moitié de l’intérieur, la seconde moitié n’étant pas accessible au public…
Sur les côtés sont exposés d’anciennes barques et matériel naval d’époque, comme ce canot percé de trous qui, accroché au raz de l’eau aux flancs des bateaux, permettaient de garder le poisson frais et vivant…
Le mur intérieur de la façade par laquelle nous venons de pénétrer, est recouvert de nombreux dessins, symboles et inscriptions d’époque, mis en valeur par de petits spots…
En réalité, comme nous l’apprend notre guide, les inscriptions, les symboles, correspondaient aux bateaux ou aux capitaines ou aux cargaisons stockées sur l’île….
Le guide nous détaille chaque inscription…
Quand le mur était saturé, on passait un coup de blanc et on recommençait avec les arrivages suivants…
Certains symboles font immanquablement penser à des confréries toujours existantes…
Nous avons droit ensuite à un diaporama détaillé nous apprenant tout ce qu’il faudrait connaitre sur le « Lazzaretto Nuovo »…
Un mannequin représentant le « Docteur de la Peste » nous rappelle la fonction de base des Lazarets, inventés par les vénitiens…
De part et d’autre, les espaces muséographiques où sont exposées les trouvailles découvertes dans la lagune et sur les iles lagunaires…
Trouvailles qui intéresseront plus particulièrement les passionnés d’archéologie et d’anthropologie…
Nous passons des pièces, sceaux, faïences et autres,
Aux bouts d’os, rassemblés jusqu’à reconstituer quelque joyeux drille…
La visite se termine…
Avant que de repartir, nous nous hissons, grâce à un petit belvédère métallique, en haut de l’avancée du mur de d’enceinte que nous avions remarquée auparavant sur le chemin de ronde…
Coup d’œil à bâbord pour admirer encore la lagune et ses « Barene »…
Coup d’œil à tribord où nous retrouvons notre petit pont de tout à l’heure…
Toutes mes excuses pour ces « foto » un peu grises, mais elles sont de saison…
Encore une balade bien instructive, mais, amoureux de la lagune, j’ai presque préféré la promenade extérieure à la visite intérieure…
Claudio Boaretto
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