À LA POURSUITE DES FLAMANTS ROSES DANS LA LAGUNE DE VENISE
Posté par Claudio Boaretto le 24 mars 2018
Mars 2018, en ce mois de mauvais temps et de gel, la lagune représente un biotope idéal et un abri sûr pour les oiseaux sédentaires ou migrateurs du fait de ses hauts-fonds, réservoirs de nourriture, et de son eau salée gelant beaucoup plus lentement que d’autres lacs, étangs ou ruisseaux de Vénétie…
La presse locale s’est alors fait l’écho de l’arrivée des « Fenicotteri rosa » (flamants roses) sur la lagune de Venise…
De quoi chatouiller sérieusement les envies des « fotografs », fussent-ils amateurs comme votre serviteur…
Seulement, la lagune vénitienne c’est 55000 hectares d’eau, d’îles, d’îlots, de lais, de marais, de chenaux…
Où sont les flamants roses ?…
Dans certains articles on pouvait lire : « On les a vu par-ci », « on en a vu par-là » …
Je suis allé « par-ci », hélas je ne les ai pas trouvés…
Aujourd’hui, ma compagne et moi, nous allons « par-là », sans trop se faire d’illusions pour ne pas être déçus…
Mais « par-là », c’est où ?…
Je vous le révèle :
Nous partons en maraude dans la zone comprise entre Torcello-Burano et Cavallino-Treporti, exactement entre « Lio Piccolo » et « Lio Maggiore » signalés par les 2 flèches rouges sur la carte ci-dessous…
Un endroit rempli de « Barene » (lais) de « Ghebi » (canaux mineurs qui traversent les Barene) et de « Velme » (hauts-fonds marécageux rarement émergés sauf par marées exceptionnellement basses) où sont installées de nombreuses vallées de pêche (pisciculture lagunaire) particularité des lieux…
Fort heureusement ces deux « Lio » sont parcourus par de petites voies de circulation très étroites où il est presque impossible de croiser une autre voiture à moins d’avoir un véhicule amphibie…
Ces petites routes permettent d’accéder aux vallées et aux quelques rares habitations, donc possibilité de circuler en automobile car à pied la zone est trop grande pour la prospecter en son entier…
C’est aussi un labyrinthe où l’on peut se perdre, ce qui n’a pas manqué de nous arriver…
Après avoir fait le tour de la lagune nord et tournicoter un bon moment, Miracolo ! …
Il est 10h15, nous découvrons nos premiers flamants roses…
Évidemment, nous sommes loin des oiseaux, très loin, impossible de se rapprocher, mon téléobjectif (300mm maxi) est à fond la gamelle et nous sommes mal positionnés rapport au soleil donnant aux eaux une teinte gris clair parfois trop brillante…
Mais nous n’avons pas le choix, déjà bienheureux d’avoir trouvé nos « Fenicotteri rosa » …
Nos flamants roses sont presque tous en train de roupiller, la tête sous l’aile, certains sur une patte, d’autres sur deux…
J’aimerais bien les voir un peu plus éveillés…
Je pousse un grand « gueulement » …
Gagné !…
Je les ai réveillés, ils lèvent la tête… Nous sommes ne plein contre-jour, mais faut faire avec…
Certains mêmes rouspètent de ce brutal réveil en poussant leurs cris rauques et un peu coincés, nous les distinguons le bec ouvert…
Je dois avoir l’air bien inoffensif car après une minute ou deux, le temps d’évaluer la situation, ils se cachent la tête à nouveau sous l’aile et se rendorment aussitôt…
Sauf un qui étend son aile si rouge…
Un autre quitte le groupe en râlant…
Après quelques shoots, nous repartons en maraude…
Un bon kilomètre plus tard, nous voyons de nouveau des flamants roses…
Ils sont quatre, mais, bien mieux exposés rapport au soleil, ils se détachent sur fond de lagune bleue…
C’est mieux pour la « foto » …
Deux dorment, je repousse mon cri de guerre pour les réveiller…
Encore gagné ! …
Du coup ils se mettent à casser la croûte, ce doit être l’heure du p’tit-déj…
ils sont accompagnés d’un couple de « Tadorne de Belon », ces oiseaux à mi-chemin entre l’oie et le canard…
Sur le cliché la femelle est devant, le mâle derrière…
Le premier flamant avance en cancanant car, comme le canard et le perroquet, le flamant « cancane » …
Jamais deux sans trois dit le proverbe, nous repartons en maraude avec l’espoir de débusquer nos troisièmes flamants roses de la matinée…
Aujourd’hui nous avons la foi…
Chemin faisant nous découvrons en bord de route, sur un petit coin de terre plus ferme, une improbable petite église, je m’arrête pour la « foto » …
Un petit écriteau nous informe qu’elle date des années 1300…
Volets ouverts et rideaux aux fenêtres, elle est maintenant maison d’habitation…
Mais le mini campanile et sa cloche sont toujours bien présents…
Tout à côté, une grande maison pittoresque affublée d’une énorme cheminée attire notre attention…
Incroyable cette cheminée, ce doit être un sacré four…
Je fais le tour du bâtiment, pas moins de trois cheminées dont une autre aussi énorme et surprenante que la première…
Que devait-on cuire là-dedans ? …
Près d’un petit « Ghebo » je repère deux canards…
On dirait des cols verts, mais, surprise, ils ne sont pas verts mais bleus !…
Des cols bleus ?…
Serait-ce des mutants ?…
Ça mérite la « foto » …
Nous continuons notre prospection et voici nos troisièmes flamants roses ! …
La chance est avec nous…
Comme d’habitude, la tête sous l’aile, ils dorment encore bien qu’il soit déjà plus de 11 heures du matin…
Ne souhaitant plus m’égosiller, je demande à ma compagne d’aller au 4×4 et de klaxonner…
Ça marche encore, bonjour tout le monde !…
Comme ils sont bien en ligne je prends 2 « foto » pour créer un panoramique afin d’avoir presque tous les oiseaux sur le même cliché…
Et voilà :
Second panoramique de 2 « foto » …
C’est chouette, j’arrive à les shooter à main levée, bien tranquilles…
Juste pour le plaisir, troisième panoramique à 3 « foto », ainsi je les ai tous sur le cliché, ils sont 25…
Ceci fait, nous continuons notre maraude…
Jamais trois sans quatre, ça ne se dit pas mais nous allons essayer quand même…
La bonne fortune nous est acquise, 10 minutes plus tard nous trouvons nos quatrièmes flamants roses…
Nul besoin de réveiller ces derniers, ils se déplacent en file indienne…
Je zoome au maximum…
Je les ai bien là, au milieu du biotope lagunaire, dans les « Velme » et les « Ghebi » …
(Ne cherchez pas ces mots dans un dictionnaire italien, ils sont en langue vénitienne) …
Ils sont à contre-jour, mais ça le fait quand-même, de toutes façons pas le choix, impossible de se positionner ailleur…
Soudain j’entends du bruit au-dessus de moi, des cris et des claquements d’ailes…
Je lève les yeux…
Deux sont en vol !…
Je n’en espérais pas tant…
Magnifiques et majestueux…
D’une rapidité stupéfiante, il me faut les shooter en rafale…
Le reste de la cavalerie…
Ils s’éloignent à grande vitesse…
À les voir voler avec tant de facilité on ne s’étonne plus qu’ils puissent venir ainsi du continent africain…
De plus en plus haut dans le ciel…
Jusqu’à n’être bientôt plus que des silhouettes…
Ce fut une grande satisfaction pour moi que de « fotografier » ces flamants roses, sauvages et en liberté totale, qui viennent désormais, depuis une petite dizaine d’années, nidifier dans notre lagune vénitienne…
J’espère vous avoir fait partager notre plaisir…
Claudio Boaretto
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