Depuis le 28 juin 2019 se tient au Musée Correr, place Saint Marc, l’exposition intitulée :
« Francesco Morosini : ultimo eroe della serenissima tra storia e mito »…
Francesco Morosini : dernier héros de la sérénissime entre histoire et mythe…
Cette exposition célèbre les 400 ans de la naissance de Francesco Morosini « le Péloponnèse » (1619-1694), figure passionnante du Capitaine Général de la Mer et 108ème Doge de Venise…
L’affiche :

(les fotografs remarqueront immédiatement les reflets en haut de l’affiche dus aux projecteurs trop puissants du musée… Malheureusement le cas se reproduit pour tous les tableaux exposés, reflets gênants même à l’œil nu… Obligé de se déplacer sur les côtés pour regarder les œuvres et tenter d’être moins indisposé par ces reflets… Difficile de comprendre pourquoi les conservateurs de cette exposition ne remédient pas à ce problème qui, à mon sens, s’avère une grave erreur muséologique)…
Petit résumé historique :
« Francesco Morosini marqua l’histoire de la République Sérénissime : « Capitaine de la Mer » à quatre reprises et 108ème Doge de Venise. Depuis son enfance, il montrait une forte inclination pour les affaires de guerre et dès que l’âge lui permit, il se consacra à la profession militaire et rejoignit le service naval de Venise. Il eut une brillante carrière au point que d’officier ordinaire, il monta jusqu’au plus haut grade de « Capitaine de la Mer ». Morosini fut l’instigateur et le chef de la dernière grande campagne d’expansion de la République vénitienne dans la guerre moréenne contre les Turcs. Après une série d’opérations brillantes, il conquit Athènes en quelques jours. Grâce à cette magnifique victoire, Morosini reçut le titre de « Péloponnèse ».
En 1688, à la suite de la mort du Doge, Francesco Morosini fut élu son successeur et resta commandant en chef de la flotte, un événement deux fois exceptionnel car un Doge n’avait jamais commandé l’armée en personne et parce que jamais auparavant un commandant de flotte de guerre ne fut élu Doge.
En 1689, le doge Morosini, atteint de maladie et de vieillesse, quitta le commandement suprême et revint à Venise avec les honneurs triomphaux. Mais en 1692, le Sénat, inquiet du succès des opérations militaires au Levant, élit pour la quatrième fois le général Morosini Capitaine de la Mer .
Le 6 janvier 1964, à l’ âge de 78 ans , Francesco Morosini décède à Nauplie, mettant ainsi fin à sa vie de grand commandant. Les funérailles furent célébrées dans la capitale de Morée récemment conquise et son cœur et ses entrailles enterrés dans l’église Saint-Antoine tandis que son corps fut emmené à l’église de Santo Stefano à Venise. Peu de temps après sa mort, le Sénat décréta qu’une arche de marbre avec des sculptures de ses grandes réalisations serait construite dans la salle du conseil du Palais des Doges. »
La première salle : la bibliothèque comprenant récits, documents et ouvrages sur la célèbre et ancienne famille patricienne Morosini…
Une série d’opuscules et de chroniques furent réalisés quasiment en temps réels sur les faits d’armes et les victoires de Francesco Morosini…
On y apprend que le rouleau contenant l’arbre généalogique des différentes branches de la famille mesure plus de 12 mètres de long…
La bibliothèque sur les Morosini contient plus de 2400 ouvrages…

Huile sur toile 1692-1693 du doge Francesco Morosini peint par Domenico Uberti …
Dans ce portrait, le dernier exécuté de son vivant, Morosini apparaît comme un glorieux condottiere au service de la Chrétienté. En armure, bâton de commandement à la main et coiffé du « Corno Ducale » le couvre-chef caractéristique des doges, sur la table, son estoc…

Son « Corno Ducale » en tissu broché…

Sa veste d’arme avec gants et pantalon en peau de buffle…

Nini, le chat momifié de Morosini auquel il fut très attaché, il embarquait avec lui et surveillait dans la calle les réserves de nourriture contre les rats…

Le buste de « Morosini el Peloponnesiaco » en marbre de carrare par Giovanni Comin…

Ce portrait, huile sur toile, où Morosini endosse l’habit distinctif des magistrats vénitiens, fut réalisé pour célébrer sa nomination le 20 septembre 1669 à la prestigieuse charge de « Procuratore di San Marco »…
Procurateur, la plus haute distinction de la république de Venise, juste en dessous du doge…

D’autres « Morosini » sont exposés dans cette salle…
Pietro Morosini…

Marcantónio Morosini…

Lorenzo Morosini…

Encore un Francesco Morosini mais pas le même…

Sur le Web, j’ai trouvé une liste des Morosini par ordre alphabétique entre le Xème et le XVIIIème siècle, 4 doges et de nombreuses épouses ou mères de doges, impressionnant :
- Albertino Morosini, duc de Candie (1290-1293)
- Alberto Morosini (XIIIe siècle), podestat vénitien, commandant de la flotte pisane à la Bataille de la Meloria (1284) lors de la prise de la Sardaigne par les Catalans
- Alessandro Morosini (XVIIIe siècle), provéditeur général, commandant de la garnison vénitienne à Corfou (1775–1777)
- Andrea Morosini, duc de Candie (1441-1443)
- Andrea Morosini (1558-1618), historien vénitien
- Angelo Morosini, duc de Candie (1255-1259)
- Antonio Morosini, duc de Candie (vers 1530)
- Bernardo Morosini, duc de Candie (1644-1646)
- Caterina Morosini, mère de Pietro Grimani (1677–1752), 115e doge de Venise
- Constanza Morosini, sœur de Tomassina Catarina Morosini et épouse de Stefan Vladislav II (1280-1325), monarque serbe de la dynastie des Nemanjić, dernier roi de Syrmie
- Dea Morosini, épouse de Nicolò Tron (1399–1473), 68e doge de Venise
- Domenico Morosini (mort en 1156), 37e doge de Venise
- Donato Morosini, duc de Candie (1617-1619)
- Egidio Morosini, duc de Candie (1417-1418)
- Elisabetta Morosini, mère de Carlo Contarini (1580-1656), 100e doge de Venise
- Elisabetta Morosini, mère de Paolo Renier (mort en 1789), 119e doge de Venise
- Francesco Morosini, duc de Candie (1612-1614)
- Francesco Morosini (1619–1694), duc de Candie (1656–1661) et (1667–1669), 108e doge de Venise
- Giovanna Morosini, mère de Nicolò Contarini (1553-1631), 97e doge de Venise
- Giovanni Morosini (xe siècle), moine bénédictin à qui le doge Tribuno Memmo céda l’Île de San Giorgio Maggiore en 982 (? Bienheureux Jean Morosini (mort en 1012) 5 février)
- Giovanni Morosini (XVe siècle), bailli et capitaine de Venise, gouverneur de la ville de Durrës, en Albanie (1419-1421)
- Giovanni Morosini, duc de Candie (vers 1530)
- Giovanni Morosini (1719-1789), évêque de Chioggia (1770-1773), puis de Vérone (1773-1789)
- Giovanni Francesco Morosini (1537-1596), cardinal, évêque de Brescia, ambassadeur de la république de Venise en Savoie, en Pologne, en Espagne, en France et à la cour ottomane auprès du sultan Amurat III
- Giovanni Francesco Morosini, patriarche de Venise de 1644 à 1664, procurateur de San Marco en 1645
- Giuseppe Morosini, duc de Candie (1650-1653)
- Goffredo Morosini, duc de Candie (1355-1357)
- Isabetta Morosini, mère de Nicolò Donato (1539–1618), 93e Doge de Venise
- Jseppo Morosini (XVIIIe siècle), noble influent, musicien amateur et protecteur de Andrea Luchesi (1741-1801), compositeur italien
- Laura Morosini, épouse de Pasqual Cicogna (mort en 1595), 88e doge de Venise
- Lodovico Morosini, duc de Candie (1407-1409)
- Marco Morosini, duc de Candie (1357-1359)
- Marco Morosini, évêque de Trévise (1639-1645) puis de Brescia (1645-1654) (mort le 4 octobre 1654)
- Marino Morosini (1181-1253), 44e doge de Venise
- Marino Morosini, duc de Candie (1274-1276)
- Mario Morosini, duc de Candie (1329-1331)
- Michele Morosini (mort en 1382), 61e doge de Venise
- Morosina Morosini, épouse de Marino Grimani (1532–1605), 89e doge de Venise
- Niccolo Morosini, patriarche de Venise en 1336
- Niccolo Morosini (XVe siècle), bailli et capitaine de Venise, gouverneur de la ville de Durrës, en Albanie (1482-1485)
- Pietro Morosini, duc de Candie (1364-1366)
- Pietro Morosini, cardinal et célèbre jurisconsulte (mort le 11 août 1424), qui travailla à la compilation du 6e livre des Décrétales
- Tomassina Catarina Morosini (morte en 1300), fille de Michel Morosini, sœur de Constanza Morosini, épouse d’István (Étienne) Árpád de Hongrie (1236-1272) et mère de André III Árpád de Hongrie (1265-1271 ou 1272)
- Tommasina Morosini (XIIIe siècle), fille de Giovanni Morosini, comte d’Arbe, et épouse de Pietro Gradenigo (1251-1311), 49e doge de Venise
- Tommaso Morosini (XIIIe siècle), patriarche latin de Constantinople (1204-1211)
- Tommaso Morosini, général des galères de Venise (mort à la Guerre de Candie en 1647)
Peinture allégorique de Gregorio Lazzarini où le Doge Francesco Morosini offre à Venise la reconquête de la « Morea » (la Morée)…

Je vous entends dire : « La Morée ? c’est où ça ? »
Ben, c’est le Péloponnèse…
Petite carte et explication :
« Le despotat de Morée (en grec: Δεσποτᾶτον τοῦ Μορέως) était une province de l’Empire byzantin, puis un État grec plus ou moins dépendant de cet Empire, État fondé au milieu du XIVe dans la péninsule du Péloponnèse, ayant pour capitale la cité de Mistra près de l’ancienne Sparte. La taille de son territoire a varié au cours de son existence, mais a fini par inclure presque toute la péninsule.
Le territoire était généralement dirigé par un ou plusieurs fils de l’empereur byzantin contemporain, voire à un membre de la famille impériale à qui on donnait le titre de despote. Le terme de « despotat » est formé sur celui de despote (Δεσπότης). Son équivalent le plus proche est prince, un despotat correspondant donc à une principauté »

« Salle d’armes du Palais Ducal avec le buste de Francesco Morosini » Huile sur toile d’Alessandro Piazza (1699)…
Ce tableau rappelle qu’en 1687, après ses succès militaires dans le Péloponnèse, le Sénat vénitien décide de dédier exceptionnellement à Morosini un monument adhuc viventi (alors qu’il est encore en vie) réalisé par le sculpteur génois Filippo Parodi…

Copie en marbre de ce monument pour le palais des Morosini à « San Stefano »…
Morosini représenté en habit de Capitaine Général de la Mer avec le typique couvre-chef « Berreta a Tozzo », l’armure avec le lion de Saint Marc en relief, la cape royale avec 5 boutons d’or, dans la main droite le bâton de commandement posé sur la carte du Péloponnèse et à la base, sous le blason de sa famille, deux autres bâtons de commandement en souvenir de ses charges précédentes de commandant suprême de la flotte en temps de guerre…

Le monumental blason en bois de la famille Morosini…
D’Or à une bande d’Azur…

Huile sur toile de Alessandro Piazza « Retour triomphal à Venise de Francesco Morosini » le 11 janvier 1690, attendu en grande pompe par l’apparat solennel vénitien pour lui conférer les insignes de Doge…

Huile sur toile « Francesco Morosini combat contre les Turcs en Candie »…
Sur ce tableau nous voyons les galères turques pourtant plus nombreuses s’enfuyant devant les galères vénitiennes plus grosses…
Le Royaume de Candie ou duché de Candie était le nom de la Crète en tant que colonie de la République de Venise… Les Morosini furent Ducs de Candie pendant plusieurs siècles…

Dans cette exposition vous pourrez découvrir de nombreux autres tableaux relatant les victoires navales et les moments historiques de Morosini…
Quelques objets d’époque attirent le viseur de mon appareil « fotografic »…
Le prie-Dieu personnel en bois doré et sculpté de Morosini…

Son bâton de commandement de Capitaine de la Mer en tant de guerre…

L’estoc de Morosini, un espadon de grande taille avec une lame de section lenticulaire en acier décorée de gravures à caractères floraux. Robuste et lourd, en dépit d’être une arme purement honorifique, il se termine par une pointe aiguë permettant de donner seulement des coups de pointe (estocade)… Le pommeau comporte les armoiries du pape Alexandre VIII Ottoboni qui, en 1689, en fit don à Morosini…

Nous terminons le reportage illustré de cette visite par le triple fanal de sa galère ducale…

L’exposition se terminera le 3 mai 2020, avis aux amateurs d’Histoire vénitienne…
Claudio Boaretto